Les défis posés par la consommation de pornographie peuvent être un sujet difficile à aborder ou même à évoquer pour les étudiants-es. Cette fiche d’information a pour but de présenter la pornographie et sa consommation problématique, de discuter des facteurs de risque et de l’impact sur le bien-être des étudiants-es, et de proposer des stratégies et des mesures de soutien pour les étudiants-es.

La pornographie (ou le porno) est tout matériel visuel, écrit ou oral destiné à exciter sexuellement le ou la spectateur-trice1. La pornographie en ligne, qui est aujourd’hui la forme la plus populaire de pornographie, a augmenté en raison de l’utilisation accrue des téléphones portables et de l’internet2. Pour les jeunes adultes, les téléphones intelligents sont le principal moyen d’accéder à ce type de matériel3.

Il a été démontré que l’exposition à la pornographie se produit très tôt. Selon une étude canadienne de 2014, l’âge moyen de la première exposition à la pornographie est d’environ 12 ans et un tiers des premières expositions peuvent avoir lieu dès l’âge de 10 ans2. Selon une étude réalisée en 2018, 1 jeune sur 5 au Canada a été exposé de manière non désirée à du matériel sexuellement explicite en ligne3.

La prévalence de l’utilisation du porno peut varier en fonction de la littérature et de la démographie étudiée. En Amérique du Nord, 70 à 80 % des hommes et 20 à 30 % des femmes de l’enseignement post-secondaire ont déclaré avoir consommé du matériel pornographique sous forme de vidéo2. Une étude plus récente suggère qu’environ 57 % des étudiants-es universitaires aux États-Unis consomment de la pornographie au cours de leur vie, avec une proportion plus élevée d’étudiants masculins déclarant une telle consommation4. En outre, la consommation de pornographie au sein de la population générale a augmenté de 4 % à 20 % dans différents pays durant la pandémie de COVID-19 5.

On parle de consommation problématique de pornographie (CPP), de consommation compulsive de pornographie ou d’addiction à la pornographie, lorsqu’il y a une consommation persistante, répétitive et incontrôlable de pornographie qui entraîne un dysfonctionnement et une détresse dans la vie quotidienne4. La détresse ne porte pas sur la moralité de la pornographie (s’il est bon ou mauvais de consommer du porno), mais plutôt sur l’incapacité à contrôler la fréquence malgré son impact sur l’individu4. La CPP peut être une conséquence fréquente d’un comportement sexuel compulsif et il a été démontré qu’elle présentait des caractéristiques compatibles avec les addictions comportementales5,6. La CPP a été associée à un risque accru de troubles mentaux tels que la dépression, les idées suicidaires et l’anxiété4,7

Pour en savoir plus sur les comportements sexuels compulsifs, veuillez vous référer à la trousse d’outils sur la réduction des méfaits sur les campus.

Le facteur triple A – l’anonymat, l’abordabilité et l’accessibilité du porno – augmente le risque de CPP chez les individus. Parmi les facteurs de risque individuels de PPU, citons 6,7:

  • être un homme
  • jeunes adultes
  • antécédents de maltraitance infantile
  • santé mentale négative (anxiété, humeur maussade)
  • faible estime de soi
  • tendance à rechercher la nouveauté
  • ennui sexuel accru
  • utilisation fréquente d’Internet

Dans l’enseignement supérieur, les étudiants hétérosexuels de sexe masculin se sont montrés plus susceptibles à la CPP, comme dans la population générale4,6. Dans la population générale, la CPP est plus fréquente chez les hommes, suivis par les personnes issues de la diversité des genres, puis par les femmes. Il n’y a pas de différence significative dans l’incidence de la CPP en fonction de l’orientation sexuelle8. Malgré cela, il est nécessaire de mener davantage d’études sur la CPP au sein des groupes d’orientations sexuelles et de genre divers dans les établissements d’enseignement postsecondaire.


Impact sur les étudiants-es 5 6 7 9

Des études ont montré que les étudiants et les étudiantes subissaient les effets de la CPP sur leur santé mentale, notamment la dépression, l’anxiété et le stress4. Des recherches supplémentaires sont nécessaires sur les effets de la CPP sur les étudiants-es issus-es de la diversité des genres.

Voici quelques-uns des effets négatifs de la CPP relevés dans la littérature :

  • Conséquences sociales, financières et académiques négatives dues à la priorité donnée au porno
  • Dysfonctionnement sexuel (manque d’excitation ou temps plus long pour atteindre l’excitation)
  • Problèmes relationnels tels que sentiment de négligence ou de méfiance envers les partenaires, attentes faussées concernant les relations, ou anxiété au sein de la relation.
  • Comportements à haut risque (consommation de substances, jeux d’argent, etc.)
  • Effets négatifs sur la santé mentale (faible estime de soi, anxiété, dépression).
  • Conséquences associées à l’utilisation prolongée d’un ordinateur ou d’un téléphone, telles qu’une fatigue oculaire, des yeux secs, des douleurs corporelles et des troubles du sommeil.
  • Augmentation de l’image corporelle négative, augmentation des comparaisons corporelles, ou dysphorie de genre.

Signes d’une CPP potentielle 10 11

  • Les efforts pour limiter l’utilisation du porno sont difficiles ou infructueux, et la personne peut même éprouver un sentiment de sevrage.
  • Augmentation du temps passé à consommer du porno ou à y penser.
  • Le porno est prioritaire par rapport à d’autres activités de la vie.
  • Manque de contrôle dans la consommation de pornographie.
  • Solitude, souvent un sentiment de distance avec son partenaire ou d’autres personnes montrant de l’intérêt.
  • Insatisfaction à l’égard de sa propre vie sexuelle ou incapacité à être performant dans la vie réelle.

Stratégies pour minimiser la CPP 5 10 11

  • Identifier quand ou ce qui déclenche l’utilisation du porno par une réflexion personnelle (tenir un journal) ou avec un-e professionnel-le de la santé mentale.
  • Créer des routines pour s’adonner à des passe-temps et à des activités de soins personnels au lieu d’utiliser du porno.
  • Ces activités peuvent être des activités sportives, des arts, des clubs et de la musique qui aident à se détendre, à se déstresser ou à faire face à des sentiments négatifs (solitude, dépression, ennui, colère).
  • Fixer des limites à l’utilisation du porno au moyen d’une alarme ou d’applications de verrouillage qui peuvent être configurées sur le téléphone.
  • Bloquer certains sites à l’aide d’une extension de navigateur
  • Créer un réseau de soutien composé d’amis-es, de membres de la famille, de professionnels-les de la santé mentale ou d’organisations communautaires.
  • Pratiquer la pleine conscience et adopter des stratégies d’adaptation aux sentiments et situations négatifs.
  • Pour certains-es, s’engager dans la spiritualité et les pratiques spirituelles peut être utile pour réduire les méfaits de la CPP.

Les stratégies d’adaptation par l’approche impliquent la résolution de problèmes ou la recherche d’informations sur les facteurs de stress de la vie, ce qui aide les gens à mieux s’adapter à la situation, contrairement aux stratégies d’adaptation par l’évitement, qui impliquent le déni ou la distraction 12.

L’adaptation par l’approche peut consister à essayer de résoudre la CPP (en recherchant plus d’informations, le soutien d’amis-es de confiance ou de professionnels-les) ou à s’attaquer à la racine du problème (par exemple, lutter contre la solitude et l’anxiété, rechercher des liens et gérer le stress).


Entamer la conversation

Il peut être difficile d’aborder les sujets liés à la consommation de pornographie ou au sexe en raison de son caractère tabou. Il est important de se rappeler que les professionnels-les de la santé mentale sont formés pour aborder des sujets difficiles. Voici quelques façons d’aborder ce sujet :

  • Présenter la CPP comme l’expérience de quelqu’un d’autre.
    Par exemple, « j’ai un ami qui lutte contre la consommation de pornographie, que pensez-vous qui pourrait l’aider ? » ou « avez-vous travaillé avec quelqu’un dont la vie est affectée par la pornographie ? »
  • Dire à son clinicien-ne que vous aimeriez aborder un sujet difficile lors de la prochaine séance ou dans un avenir proche.
    Cela peut aider à se préparer mentalement.
  • Commencer par évoquer le caractère tabou du sujet.
    Par exemple, « je veux parler de quelque chose, mais je ressens de la honte/du jugement à ce sujet, et je ne sais pas comment vous en parler ».

Soutien 10 11

Vous pouvez trouver différentes formes de soutien sur le campus ou au sein de votre communauté. Nous vous recommandons de vous renseigner sur ces options en fonction de ce qui vous convient le mieux ou de vous renseigner auprès d’un-e professionnel-le de la santé mentale. Les soutiens mentionnés ci-dessous se sont avérés utiles pour les personnes aux prises avec un comportement sexuel compulsif ou une CPP :

  • Rechercher le soutien d’un-e professionnel-le de la santé mentale ou appeler un service d’assistance téléphonique (par exemple Allo J’écoute).
    • Un soutien spécialisé peut être proposé par un-e sexologue ou un-e thérapeute certifié-e en matière d’addiction sexuelle.
  • Groupes de soutien et de rétablissement au sein de la communauté (par exemple, Sex Addicts Anonymous)
  • Se connecter à des services comme ConnexOntario pour trouver des ressources disponibles dans votre région.

Autres ressources du CISMC


    References

  1. Jha, A., & Banerjee, D. (2022). Neurobiology of Sex and Pornography Addictions: A Primer. Journal of Psychosexual Health, 4(4), 227–236. https://doi.org/10.1177/26318318221116042[]
  2. Hare, K., Gahagan, J., Jackson, L., & Steenbeek, A. (2014). Perspectives on “Pornography”: Exploring sexually explicit Internet movies’ influences on Canadian young adults’ holistic sexual health. The Canadian Journal of Human Sexuality, 23(3), 148–158. https://doi.org/10.3138/cjhs.2732[][][]
  3. Madigan, S., Villani, V., Azzopardi, C., Laut, D., Smith, T., Temple, J. R., Browne, D., & Dimitropoulos, G. (2018). The Prevalence of Unwanted Online Sexual Exposure and Solicitation Among Youth: A Meta-Analysis. Journal of Adolescent Health, 63(2), 133–141. https://doi.org/10.1016/j.jadohealth.2018.03.012[][]
  4. Camilleri, C., Perry, J. T., & Sammut, S. (2021). Compulsive Internet Pornography Use and Mental Health: A Cross-Sectional Study in a Sample of University Students in the United States. Frontiers in Psychology, 11. https://doi.org/10.3389/fpsyg.2020.613244[][][][][]
  5. Vieira, C., & Griffiths, M. D. (2024). Problematic Pornography Use and Mental Health: A Systematic Review. Sexual Health & Compulsivity, 31(3), 207–247. https://doi.org/10.1080/26929953.2024.2348624[][][][]
  6. Mauer-Vakil, D., & Bahji, A. (2020). The Addictive Nature of Compulsive Sexual Behaviours and Problematic Online Pornography Consumption: A Review. The Canadian Journal of Addiction, 11(3), 42–51. https://doi.org/10.1097/cxa.0000000000000091[][][][]
  7. De Alarcón, R., De La Iglesia, J. I., Casado, N. M., & Montejo, A. L. (2019). Online Porn Addiction: What We Know and What We Don’t—A Systematic Review. Journal of Clinical Medicine, 8(1), 91. https://doi.org/10.3390/jcm8010091[][][]
  8. Bőthe, B., Nagy, L., Koós, M., Demetrovics, Z., Potenza, M. N., International Sex Survey Consortium, & Kraus, S. W. (2024). Problematic pornography use across countries, genders, and sexual orientations: Insights from the International Sex Survey and comparison of different assessment tools. Addiction (Abingdon, England), 119(5), 928–950. https://doi.org/10.1111/add.16431[]
  9. Willoughby, B. J., Carroll, J. S., Nelson, L. J., & PadillaWalker, L. M. (2014). Associations between relational sexual behaviour, pornography use, and pornography acceptance among US college students. Culture, Health & Sexuality, 16(9), 1052–1069. https://doi.org/10.1080/13691058.2014.927075[]
  10. Pornography Addiction – Student Counseling Center | UT Dallas. (n.d.). https://counseling.utdallas.edu/resources/pornography-addiction/[][][]
  11. Pornography Addiction Help: Effective Porn Addiction Treatment & Sex Addiction Therapy. (n.d.). https://www.simcoerehab.ca/porn-addiction-treatment/[][][]
  12. Holahan, C., Moos, R., & Groesz, L. (2007). Community Studies. In Elsevier eBooks (pp. 536–541). https://doi.org/10.1016/b978-012373947-6.00089-1[]

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