- Introduction à la Intersectionnalité invisible
- Introduction à la santé mentale dans les communautés 2SLGBTQ+
- Identités intersectionnelles et obstacles supplémentaires
- Recommandations pour mieux soutenir les étudiants-es 2SLGBTQ+ sur le campus
- Soutien aux étudiants-es sur le campus
- Reconnaître les lacunes
- Glossaire
- Références
Home Intersectionnalité invisible – Soutenir les étudiants-es 2SLGBTQ+ sur le campus Introduction à la santé mentale dans les communautés 2SLGBTQ+
Introduction à la santé mentale dans les communautés 2SLGBTQ+
Selon Statistique Canada, environ un million de personnes au Canada se sont identifiées comme des minorités sexuelles en 2018, ce qui représentait 4 % de la population canadienne âgée de 15 ans ou plus. Les jeunes de 15 à 24 ans représentaient 30 %, soit un peu moins d’un tiers de la population 2SLGTBQ+, contre 14 % de la population non 2SLGBTQ+.
Expériences de la violence
De façon alarmante, l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés a révélé que les Canadiens-nes qui s’identifient à une minorité sexuelle étaient plus susceptibles de déclarer avoir été victimes de violence au cours de leur vie, ainsi que de comportements inappropriés en public et en ligne, comparativement aux Canadiens-nes qui ne sont pas membres d’une minorité sexuelle. Plus précisément, depuis l’âge de 15 ans et au cours des 12 derniers mois, les Canadiens-nes membres d’une minorité sexuelle étaient plus susceptibles d’avoir été victimes d’une agression physique ou sexuelle comparativement aux Canadiens-nes hétérosexuels-les, à l’exclusion de la violence commise par un-e partenaire intime.
Malgré les efforts déployés pour améliorer les droits humains des personnes transgenres par le biais de la législation fédérale, et les rapports de Statistique Canada sur les expériences des Canadiens-nes transgenres et la violence sexiste, les actes transphobes se poursuivent.
Impact de la stigmatisation et de la violence sur la santé mentale
Dans sa théorie du stress minoritaire (Meyer, 2003), Meyer met en évidence un cadre permettant de comprendre la santé mentale des minorités sexuelles. Il affirme que les minorités sexuelles sont plus susceptibles de subir des facteurs de stress social chroniques en raison de leur identité stigmatisée. Les expériences distinctes auxquelles les personnes 2SLGBTQ+ sont confrontées, notamment la victimisation, les préjugés et la discrimination, compromettent de manière disproportionnée leur santé mentale et leur bien-être (Gnan et al., 2019). En outre, la recherche montre également que les communautés 2SLGBTQ+ sont plus susceptibles d’avoir des pensées suicidaires que leurs homologues hétérosexuels en raison des abus, du désespoir, de la faible estime de soi, du faible soutien social et des relations sociales négatives (Gnan et al., 2019).
Prévalence des problèmes de santé mentale
Fait choquant et regrettable, en 2019, la police a signalé 41 % de plus de crimes haineux liés à l’orientation sexuelle par rapport à l’année précédente (StatsCan, 2021). 32 % des Canadiens-nes d’orientation sexuelle minoritaire ont déclaré que leur santé mentale était mauvaise ou passable dans les données de 2019 (contre 11 % en 2018) et 41 % ont reçu un diagnostic de trouble anxieux (contre 16 % en 2018) (StatsCan, 2021). Si l’on se concentre sur les jeunes, les données montrent que la dépression et les troubles anxieux sont jusqu’à trois fois plus fréquents chez les jeunes LGB que chez leurs homologues hétérosexuels-les (Lucassen et al. 2017 ; Plöderl et Tremblay 2015). Les jeunes LGBTQ sont encore plus exposés à un risque de mauvaise santé mentale que les adultes LGBTQ plus âgés. En se concentrant spécifiquement sur le niveau postsecondaire, une étude récente basée au Royaume-Uni a révélé que 33 % des étudiants-es de première année d’université de 8 pays différents qui s’identifiaient comme membres des communautés 2SLGBTQ+ avaient eu des idées suicidaires au cours de leur vie, contre 16,4 % de l’ensemble des étudiants-es du niveau postsecondaire interrogés au Canada (American College Health Association, 2019).
De même, des études canadiennes ont révélé que les jeunes LGB étaient environ cinq fois plus susceptibles que leurs pairs-es hétérosexuels-les de déclarer des idées suicidaires, et plus de deux fois plus susceptibles d’avoir tenté de mettre fin à leur vie au cours de la dernière année (Egale et l’École de santé publique de l’Université de Montréal, 2021).
Résilience et réponse communautaire
Les communautés 2SLGBTQ+ ont été et continuent d’être résilientes. Bien que les communautés 2SLGBTQ+ aient subi la haine, la violence, l’homophobie, la biphobie et la transphobie, ces mêmes communautés, collectivement et individuellement, ont lutté pour obtenir des droits, des libertés et des protections en vertu de la loi canadienne. La résilience a été et continue d’être un élément important de la santé mentale des 2SLGBTQ+ et le soutien au développement de cette résilience est une composante clé d’un sentiment de bien-être florissant.
Lorsque les membres des communautés 2SLGBTQ+ trouvent des espaces sécuritaires pour parler de leurs expériences, de leurs défis, de leur santé mentale et de leur bien-être, ils peuvent éprouver des sentiments de sécurité, de croissance et de possibilité de guérison. Par exemple, une étude de Revilla (2010) a mis en évidence les expériences de femmes queer de couleur dans un espace sécuritaire universitaire et leur soutien par un collectif de femmes appelé « Raza Womyn », leur permettant de discuter des problèmes auxquels elles étaient confrontées et d’avoir des conversations qu’elles ne pouvaient pas avoir ouvertement avec leurs familles ou dans leurs contextes culturels (Revilla, 2010). Lorsque ces femmes ont senti qu’elles disposaient d’un espace sécuritaire au sein de leur université, elles ont entamé un processus de croissance et de conscientisation qui est devenu la source ultime de force pour ce groupe.
Mais plus que l’éducation et la sensibilisation, le concept d’un « espace plus sécuritaire », comme on le voit dans l’exemple de « Raza Womyn », comprenait des sentiments d’amour, d’espoir, de plaisir, de sécurité et d’intimité. La création d’espaces d’adaptation et de connexion avec les membres de la communauté peut contrer certains des stress liés à la navigation dans des environnements hostiles et/ou anti-queer (Gilmour, 2019).
Hétéronormativité et cisnormativité sur les campus
De plus en plus de recherches illustrent l’importance pour les établissements d’enseignement postsecondaire d’offrir un climat accueillant et inclusif à tous et toutes les étudiants-es afin d’accroître leur sentiment d’appartenance à l’université. La recherche montre que lorsque les universités investissent pour rendre le climat de leur campus positif, accueillant et sécuritaire pour les étudiants-es LGBTQ, ces derniers-ières sont plus susceptibles de participer aux activités parascolaires du campus et de contribuer à une croissance et un développement positifs de soi (Pryor, 2018).
Preston et Hoffman ont développé le concept d’établissement traditionnellement hétérogenré, qui postule que les campus et les climats scolaires ont été façonnés par et pour des individus hétérosexuels, qui, dans une certaine mesure, soutiennent les programmes LGBTQ, mais ont une vision très limitée de la réussite et des histoires des étudiants-es LGBTQ (Pryor, 2018). Parce que les étudiants-es LGBTQ sont définis-es comme étant « Autre » et sont souvent considérés-es comme des étudiants-es qui « doivent être sauvés-es », le concept d’établissement traditionnellement hétérogenré souligne qu’aujourd’hui encore, les établissements sont gérés d’un point de vue cisgenre, malgré les diverses politiques et programmes de diversité actuellement en place. Ce concept est un cadre important pour considérer et comprendre comment les politiques, les pratiques et les processus des établissements excluent les étudiants-es minoritaires et comment de telles traditions peuvent être démantelées pour centrer les expériences des étudiants-es, des professeurs-es et des membres du personnel 2SLGBTQ+.
Grâce à des politiques progressistes et à l’adoption de principes d’équité, de diversité et d’inclusion, des progrès substantiels et des changements positifs ont été enregistrés pour les corps étudiant et professoral 2SLGBTQ+. Cependant, bien que les universités disposent de bureaux de la diversité et que des lois sur les droits de l’homme soient en vigueur, elles ne font pas grand-chose pour réduire les microagressions ou pour remédier au fait que les apprenants-es et les éducateurs-trices peuvent souvent ressentir de l’isolement et un sentiment de malaise dans un climat normatif hétéro/cisgenre (Beagan et al., 2020). La recherche montre que l’homophobie, la biphobie et la transphobie restent endémiques dans les universités canadiennes, et les environnements typiques des campus ne sont pas excessivement accueillants ou affirmatifs pour les étudiants-es 2SLGBTQ+ (Pryor, 2018). L’un des résultats de ce climat est la réticence de nombreux étudiants-es et professeurs-es à dévoiler leur orientation sexuelle et à ne pas s’isoler pour vivre une expérience plus positive sur leur campus (Dentato et al., 2014). De plus, la plupart des établissements d’enseignement postsecondaire au Canada ont une « culture omniprésente de la clandestinité », où l’on présume que l’on est hétérosexuel ou cisgenre, sauf preuve du contraire (Beagan et al., 2020).
Cultures au niveau postsecondaire et perceptions de la sécurité
À l’instar des résultats de l’Enquête sur la sécurité dans les espaces publics et privés sur les expériences de violence des personnes 2SLGBTQ+, les recherches suggèrent que les microagressions envers les communautés 2SLGBTQ+ sont omniprésentes dans les établissements d’enseignement postsecondaire canadiens, malgré les protections formelles des droits de la personne au Canada. Ces microagressions mènent à l’isolement, au tokénisme et à la marginalisation (Beagan et al., 2020). La culture hétéronormative des établissements d’enseignement postsecondaire canadiens passe souvent inaperçue et n’est pas examinée, ce qui peut susciter des sentiments d’inconfort et de méfiance (Dentato et al., 2014). Une recherche sur les établissements d’enseignement postsecondaire canadiens a montré que 34 % des étudiants-es LGBT+ avaient le sentiment de ne pas être à leur place, contre 28 % des étudiants-es hétérosexuels-les (Woodford et al., 2019). L’étude a également montré que parallèlement à un sentiment d’appartenance plus faible, 20 % des étudiants-es LGBT+ ont déclaré se sentir en danger la nuit, contre 16 % des étudiants-es hétérosexuels-les cisgenres.
Pour en savoir plus sur l’étude menée à l’échelle de l’Ontario sur les étudiants-es LGBTQ sur les campus, consultez l’étude LGBTQ – S’épanouir sur le campus ici.
Dans l’ensemble, le défi de comprendre les besoins des étudiants-es 2SLGBTQ+ est réel – il y a un manque de données précises sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre des étudiants-es pour la plupart de nos institutions au niveau national. En rapport avec les étudiants-es, une étude a mis en évidence les problèmes auxquels les professeurs-es 2SLGBTQ+ sont confrontés-es dans leurs établissements – du sentiment d’isolement au risque de perte de crédibilité et de réponse, en passant par de mauvaises évaluations de l’enseignement et de fausses accusations concernant leurs relations avec les étudiants-es. De plus, comme stratégie d’adaptation, les professeurs-es s’isolaient de la communauté du campus et préféraient se connecter à des communautés queer extérieures pour obtenir un soutien émotionnel plutôt que de chercher du soutien au travail (Beagan et al., 2020).