Revue de la littérature

Pour adopter une approche globale fondée sur des données probantes

Les services en santé mentale des établissements d’enseignement postsecondaire signalent une augmentation du nombre de personnes faisant appel à eux pour des problématiques de santé mentale plus graves (Crozier & Willihnganz, 2006). Une étude menée par l’Ontario University College Health Association (OUCHA) en 2009 indique que 6 % de la population étudiante de niveau postsecondaire avait songé au suicide au cours de l’année précédente (cité dans Crozier & Willihnganz, 2006). Selon des données plus récentes, ce chiffre est passé à 16 % (ACHA-NCHA, 2019). Les besoins en santé mentale connaissant une croissance exponentielle, les établissements d’enseignement doivent travailler ensemble pour trouver des ressources efficaces lorsque survient une crise. Quoi qu’il en soit, il n’existe pas actuellement de normes pour guider les campus sur les mesures à prendre. Nous les encourageons à adopter une approche globale et à tenir compte des recommandations suivantes, que nous avons tirées d’une revue de la littérature de recherche et qui se fondent sur des données probantes.

Qu’est-ce qu’une crise ? Qu’est-ce que la détresse ? • • • • • • • • • • • • •

On définit une crise comme toute situation dans laquelle une personne est à risque de se faire du mal ou de faire du mal à d’autres personnes, ou encore de n’être plus en mesure de prendre soin d’elle-même ou de fonctionner de manière saine. Par ailleurs, la détresse est un état de souffrance émotionnelle liée à des éléments stressants et des exigences avec lesquels un individu à de la difficulté à composer.

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Établir une politique intégrée d’intervention de crise en santé mentale sur le campus

Une étude récente signale que les établissements d’enseignement postsecondaire canadiens n’ont pas nécessairement de politiques concernant l’intervention de crise en santé mentale sur leur campus (Somma, Jaworska, Heck & MacQueen, 2017). Au moment de la recherche, seulement 40 % des établissements avaient des protocoles pour aider les étudiants et les étudiantes aux prises avec des problématiques graves de santé mentale et 32 % avaient des politiques d’intervention auprès de ceux qui avaient fait une tentative de suicide ou mentionné leur intention de se suicider (Somma, Jaworska, Heck & MacQueen, 2017). Ces données signalent un besoin évident de politiques intégrées d’intervention de crise en santé mentale, mais il existe peu d’indications sur les meilleures pratiques et comment les implanter efficacement. Les recherches existantes mettent l’accent sur les équipes d’intervention communautaires et les partenariats avec les organismes du milieu.

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Déterminer quels services ou organismes, sur le campus et hors campus, offrent de l’aide aux étudiants en situation de crise, et si de nouvelles collaborations gagneraient à être faites ou améliorées.

Une intervention de crise efficace comporte plusieurs facettes et implique généralement divers acteurs, notamment les services de sécurité et de santé mentale du campus, les équipes d’intervention de crise, les services d’urgence locaux et les lignes d’écoute. Une étude sur les interventions de crise en santé mentale dans un établissement d’enseignement postsecondaire ontarien rapporte que sur 311 situations, 34,1 % des étudiants ont été transportés à l’hôpital, 24 % ont nécessité une intervention médicale d’urgence, 21 % ont utilisé les services d’une équipe d’intervention de crise; dans 11,9 % des cas, on a fait appel à la police locale tandis que dans 39,5 % des cas, aucune ressource externe au campus n’a été utilisée (Porter, 2018).

Certains établissements d’enseignement postsecondaire comptent leurs propres équipes d’intervention de crise. En 2005, l’Université de Colombie-Britannique a mis en place une telle équipe composée d’employés du centre de counselling et des services s’occupant respectivement des étudiants handicapés, de la santé, de la vie aux résidences, des affaires académiques et de la sécurité afin d’assurer un soutien tous azimuts à la population étudiante (Washburn & Mandrusiak, 2010). L’Université de Floride applique pour sa part un modèle impliquant une équipe d’intervention de crise dont font partie certains agents de la police du campus qui ont reçu une formation pour reconnaître les signes de maladie mentale, avoir des bases en psychopharmacologie et connaître les ressources (sur le campus et hors campus); ils apprennent aussi comment désamorcer une situation de crise (Margolis & Shtull, 2012).

En cas de crise, le but de ces agents est de mettre en contact la personne qui a besoin d’aide avec les ressources disponibles, sur le campus ou hors campus, tout en assurant sa sécurité (Margolis & Shtull, 2012). Cette étude soulignait l’importance d’offrir une formation adéquate aux agents de sécurité des établissements d’enseignement et de leur donner accès aux ressources d’aide. Pour améliorer leurs interventions en situation de crise en santé mentale, on recommande notamment de mettre l’accent sur des approches multidisciplinaires et de prioriser les partenariats et la collaboration. Par exemple, un établissement d’enseignement peut rassembler divers services et organismes pour concevoir un programme de formation clarifiant les rôles et responsabilités de chacun, et indiquant comment accéder à ces différents services en cas de crise (Council of State Governments, 2002; Schwarzfield et al, 2008, cité dans Margolis & Shtull, 2012). Étant donné que les services de sécurité sont un des premiers points de contact lors d’une crise en santé mentale, il est très important de fournir à leurs agents la formation et les ressources adéquates (Margolis & Shtull, 2012).

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Créer des équipes d’intervention comportementale

Les équipes ou unités d’intervention comportementale constituent une autre approche qu’on retrouve dans plusieurs campus aux États-Unis. Il s’agit de créer un groupe interdisciplinaire d’employés de l’établissement d’enseignement postsecondaire pour évaluer les cas d’étudiants et d’étudiantes présentant des comportements inquiétants (détresse émotionnelle, rédaction de textes dérangeants, commentaires et comportements agressifs ou suicidaires) (Cornell, 2010, cité dans Golston, 2015; Frederick Community College, 2017). Les situations étudiées par ces équipes se révélaient le plus souvent liées à des problématiques de santé mentale (Golston, 2015; Mardis, Sullivan & Gamm, 2013, cité dans Self, 2017). Selon une étude menée dans plus de 800 collèges et universités, 92 % indiquaient avoir en place une structure correspondant au moins en partie à une équipe d’intervention comportementale ou d’évaluation des menaces ou des comportements préoccupants (Van Brunt et al., 2012).

On recommande que ces équipes d’intervention comportementale comprennent entre cinq et huit personnes travaillant de près avec la population étudiante (Van Brunt et al., 2012 Penven & Janosik, 2012, Goltson, 2015). La plupart des équipes étudiées par Van Brunt et al. (2012) étaient principalement composées d’employés des services de counselling, de sécurité, des résidences et des affaires académiques ainsi que de doyens et de doyennes, et elles se réunissaient une fois par semaine ou aux deux semaines. D’autres se rencontraient de façon mensuelle ou au besoin. Une réunion hebdomadaire est recommandée afin de maintenir la communication et de suivre les progrès (Eells & Rockland-Miller, 2011; cité dans Golston, 2015). Une autre étude portant sur la formation reçue par les membres des équipes d’intervention comportementale indique qu’ils participaient à des conférences, des formations du Centre national pour la gestion de risque dans le milieu des études supérieures (National Center for Higher Education Risk Management), des webinaires et des ateliers offerts par des experts (Mardis, Sullivan & Gamm, 2013).

Selon The Book on BIT (« Le livre sur les équipes d’intervention comportementale »), voici les 10 fonctions d’une telle équipe :
  1. Faire de l’éducation sur le campus sur les comportements préoccupants et les procédures pour les signaler;
  2. Offrir un service de consultation et de soutien aux personnes qui ont à venir en aide aux étudiants et aux étudiantes qui présentent des comportements préoccupants ou dérangeants, qu’elles fassent partie du personnel enseignant ou non enseignant, de la direction ou de la population étudiante;
  3. Être le point de contact central pour les personnes qui signalent des comportements anormaux ou dépassant certaines limites établies;
  4. Faire le tri des signalements — déterminer les schémas de comportements préoccupants qui semblent indiquer qu’il y a lieu d’intervenir;
  5. Éavaluer les risques;
  6. Déterminer les ressources offertes;
  7. Suivre un protocole officiel donnant des instructions pour la communication, la coordination et l’intervention;
  8. Coordonner le suivi des dossiers — mettre les personnes en contact avec les ressources dont elles ont besoin, sur le campus ou hors campus;
  9. Continuer d’observer les comportements des personnes qui ont été signalées;
  10. Évaluer le succès à long terme des interventions (Sokolow et al, 2014, p. 4-8, cité dans Golston, 2015).

Étant donné la demande croissante pour de telles équipes d’intervention, la Jed Foundation (2013) a reconnu le besoin d’un cadre de travail et d’orientation pour les collèges et les universités qui souhaitent en mettre en place. En collaboration avec l’Alliance des services médicaux et de santé pour l’éducation supérieure (Higher Education Medical Health Alliance), elle a créé un guide pour l’implantation et l’amélioration des équipes d’intervention comportementale qui aborde les cinq éléments suivants :

  1. La mission et le but de l’équipe d’intervention
  2. Le nom à lui donner
  3. La composition, la taille et la direction de l’équipe
  4. Les fonctions de l’équipe
  5. Les écueils et les obstacles communément rencontrés

Ce guide expose également certains enjeux importants ainsi que des exemples d’implantation un peu partout aux États-Unis, présentant notamment l’équipe CARE de l’Université du Texas du Nord et l’équipe d’alerte de l’Université Cornell. On peut aussi citer la Behavioural Evaluation and Response Team (BERT) du Frederick Community College, qui est composée de gestionnaires de différents départements, d’un superviseur des services de sécurité et d’une personne professionnelle du counselling (Frederick Community College, 2017). La BERT évalue les cas qui lui sont signalés et fait un suivi auprès des étudiants et des étudiantes en question pour explorer quelles stratégies pourraient être utilisées par rapport aux comportements préoccupants; elle continue ensuite de surveiller les comportements et oriente les personnes vers les ressources offertes, notamment le centre de counselling du collège; elle peut également recommander de prendre un congé de maladie ou une pause des études. Une telle équipe agit ainsi de manière proactive par rapport aux crises éventuelles plutôt que de faire de l’intervention de crise immédiate. Le Frederick College encourage les personnes témoins d’une situation de crise à composer le 911 ou à appeler le service de sécurité du campus. Pour terminer, malgré ce cadre de travail et le nombre d’équipes d’intervention de crise existantes, il y a très peu d’études sur leur efficacité ou leurs retombées.

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Incorporer le counselling aux services de santé pour une approche intégrée des soins offerts à la population étudiante

Les établissements d’enseignement postsecondaire doivent établir des partenariats avec les organismes communautaires pour s’assurer d’offrir rapidement une aide prioritaire aux étudiants et aux étudiantes dont les problématiques dépassent les services offerts sur le campus (Lamberg, 2006). Les collèges et les universités peuvent également intégrer le counselling aux services de santé (American College Health Association, 2010), adoptant ainsi une approche holistique et globale des soins offerts. Par exemple, à l’Université du Texas à Austin, le centre de counselling et de santé mentale a collaboré avec les services de santé pour créer un programme de santé intégrée afin d’élargir son offre de services psychologiques à la population étudiante (Tucker, Sloan, Vance & Brownson, 2008). Dans le cadre de ce programme, deux psychologues et deux travailleurs sociaux employés par les services de santé de l’université interviennent auprès des étudiants en situation de crise.

Les chercheurs recommandent aussi d’offrir des services de santé sur le campus afin de réduire le besoin d’hospitalisation des étudiants et des étudiantes (Porter, 2018). Étant donné l’augmentation des situations de crise en santé mentale, qui nécessitent souvent une hospitalisation psychiatrique, les campus pourraient gagner à offrir des soins psychiatriques ou à créer des liens plus forts avec les services qui en offrent hors campus. Une étude a révélé que 33,7 % des soins psychiatriques sont donnés par un médecin ou une infirmière et que 23,9 % des établissements d’enseignement postsecondaire n’offrent aucuns soins psychiatriques sur le campus, dirigeant plutôt les personnes dans le besoin vers les ressources externes (American College Health Association, 2010). De même, une enquête auprès de la direction des centres de counselling aux États-Unis a signalé que 30 % des établissements d’enseignement postsecondaire n’offrent pas de soins psychiatriques; 66 % des répondants travaillant pour des campus qui en offrent ont déclaré qu’ils étaient inadéquats (Barr, Krylowicz, Reetz, Mistler, Rando, 2011). Au Canada, l’offre sur les campus est très limitée : 57 % des établissements d’enseignement de grande taille et 29 % de ceux de taille moyenne offrent des consultations en psychiatrie, ce qui n’est le cas d’aucun établissement de petite taille (Jaworska et al., 2014).

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Créer des partenariats et des ententes avec les ressources hors campus

Une collaboration efficace entre les services offerts sur le campus et hors campus est essentielle pour assurer la continuité des soins (Jed Foundation, 2006; Suicide Prevention Resource Center, 2004; cité dans Washburn & Mandrusiak, 2010). Washburn & Mandrusiak (2010) recommandent ainsi que les universités et les collèges établissent des partenariats hors campus notamment avec des médecins spécialisés en santé mentale ainsi qu’avec les services d’urgence des hôpitaux et les postes de police. Cela s’avère d’autant plus pertinent qu’une autre étude auprès des directions de centres de counselling révélait que 9,4 % de leurs clients étaient dirigés vers des ressources hors campus pour des soins spécialisés ou plus intensifs (Gallagher, 2010). De plus, une enquête menée en 2006 auprès des directions des centres de counselling des universités et des collèges américains indiquait que 2 069 étudiants et étudiantes de niveau postsecondaire avaient été hospitalisés pour des symptômes de maladie mentale, avec une moyenne de 8,6 personnes par établissement d’enseignement au cours d’une année (Gallgher, 2007). Malgré une utilisation fréquente des services hospitaliers et psychiatriques locaux par la population étudiante, les directions d’établissements d’enseignement postsecondaire ont signalé un manque de collaboration avec ces derniers. Le personnel hospitalier n’a pas nécessairement une bonne compréhension du contexte scolaire; les étudiantes et les étudiants hospitalisés reçoivent souvent leur congé de l’hôpital de façon prématurée et retournent à l’école sans préavis (Rockland-Miller 2000, Rockland-Miller 2003, cité dans Rockland-Miller & Eells, 2008).

Rockkland-Miller & Eells (2008) souligne l’importance de créer des partenariats et des ententes entre les établissements d’enseignement et les hôpitaux locaux afin de favoriser un processus d’hospitalisation plus sécurisant. Quand le médecin du collège ou de l’université a déterminé qu’une personne doit être hospitalisée, il devrait lui demander de signer un formulaire de consentement au partage d’information (Rockkland-Miller & Eells, 2008). Une fois que cela est fait, le médecin ou un employé administratif du campus devrait communiquer avec l’hôpital local pour parler à une personne-ressource déterminée par l’entente de partenariat pour que celle-ci donne à l’étudiant ou à l’étudiante toutes les informations nécessaires (Rockkland-Miller & Eells, 2008). Le déroulement du transport vers l’hôpital dépend ensuite des circonstances : s’il s’agit d’une admission volontaire, on pourrait demander à un ami ou un membre de la famille de la personne en crise de l’accompagner. Si l’hospitalisation n’est pas volontaire, l’ambulance et les services de sécurité du campus seraient requis (Rockkland-Miller & Eells, 2008). Bref, les établissements d’enseignement postsecondaire gagneraient à envisager des partenariats, des ententes et des processus de collaboration avec les hôpitaux locaux pour améliorer leur intervention de crise en santé mentale.

Bien que Rockland-Miller & Eells (2008) mettent l’accent sur la responsabilité qu’ont les collèges et les universités d’établir et de maintenir des partenariats avec les hôpitaux locaux, d’autres chercheurs explorent plutôt le rôle que pourraient jouer les hôpitaux et les services en santé mentale dans le soutien à offrir à la population étudiante. L’Hôpital McLeans à Belmont au Massachusetts a ainsi mis sur pied un programme de santé mentale (le College Mental Health Program ou CMHP) visant à intégrer les systèmes de l’hôpital et des universités ou collèges (Pinder-Amaker & Bell, 2012). Ce programme offrait du soutien clinique direct aux étudiants et aux étudiantes en plus d’évaluer les protocoles et d’établir des politiques et des normes pour améliorer leur expérience d’hospitalisation, le cas échéant (Pinder-Amaker & Bellm 2012). Trente pour cent des étudiants participant à ce programme étaient hospitalisés dans l’unité de soins à court terme, vraisemblablement parce qu’ils présentaient des symptômes aigus (Pinder-Amaker & Bellm, 2012). La collaboration entre l’établissement d’enseignement et le système hospitalier a donc amélioré les retombées pour les étudiants qui avaient besoin de tels soins (Pinder-Amaker & Bellm 2012).

Partenariat en Ontario • • • • • • • • • • • • •

L’Université de Toronto propose un exemple canadien de ce type de partenariat : elle collabore avec le Centre pour les dépendances et la santé mentale (Centre for Addictions and Mental Health ou CAMH) pour implanter des services de santé mentale sur le campus selon une approche de soins par paliers.

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Établir avec les hôpitaux locaux des protocoles d’obtention de congé qui incluent un suivi avec les services des campus

Pour assurer un meilleur rétablissement après l’hospitalisation, il est important de planifier ce qui se passera quand l’étudiant ou l’étudiante obtiendra son congé de l’hôpital ainsi que le suivi qui sera fait. Regardons un peu les résultats d’une recherche portant sur des personnes inscrites à un programme d’études de niveau collégial ayant subi une évaluation dans le cadre d’un programme d’urgence psychiatrique (le Comprehensive Psychiatric Emergency Program ou CPEP) lors d’une crise en santé mentale (Mitchell, Kader, Haggerty, Bakhai & Warren, 2013). Elles représentaient 8 % de tous les patients de ce programme âgés de 18 à 40 ans et la durée moyenne de leur hospitalisation était de 2,38 jours tandis que celles qui étaient admises à l’unité de psychiatrie y restaient en moyenne 8,93 jours. Mais 77 % obtenaient leur congé le jour même de leur admission. La majorité des étudiants et des étudiantes n’ayant ainsi pas été admis au programme, on peut comprendre l’importance du processus de suivi au moment de recevoir leur congé. Après avoir reçu leur congé, 79 % de ces personnes ont été dirigées vers des services en santé mentale externes, 14 % vers des services de counselling offerts sur le campus et 7 % n’ont pas été orientées vers d’autres ressources (Mitchell, Kader, Haggerty, Bakhai & Warren, 2013). Enfin, 50 % ont été dirigées vers un organisme communautaire avec lequel elles ont pris un rendez-vous avant de recevoir leur congé.

Toujours selon Mitchell, Kader, Haggerty, Bakhai & Warren (2013), le fait d’avoir un rendez-vous fixé avant d’obtenir leur congé a augmenté la probabilité que les étudiants et les étudiantes utilisent effectivement les services d’aide après avoir quitté l’hôpital. La planification du congé et du suivi est donc un aspect important d’un plan de postvention favorisant le rétablissement posthospitalisation et devrait faire partie des stratégies à intégrer à un processus d’amélioration de l’intervention de crise en santé mentale. Plus encore, les personnes qui accordent les congés devraient faire un suivi auprès des étudiants et des étudiantes pour s’assurer qu’ils suivent le traitement recommandé. En fait, la personne qui accorde les congés peut avoir un tel impact sur leur rétablissement qu’il serait important tant pour les hôpitaux que pour les campus d’établir des partenariats pour s’assurer d’une bonne coordination des soins offerts (voir l’exemple présenté en annexe).

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Faire connaître les services de counselling en cas de crise offerts 24 h/24 et en faciliter l’accès

Il importe également de mentionner les changements aux protocoles et aux politiques d’intervention de crise en santé mentale liés à la pandémie de la COVID-19. La plupart des collèges et des universités ont offert leurs cours à distance. Selon l’évaluation effectuée par le CISMC au cours des dernières années, il s’agit d’un obstacle à ce que les étudiants et les étudiantes reçoivent de l’aide rapidement. Avec l’incertitude scolaire, l’isolement social, la perte de la routine, la difficulté de se concentrer et les préoccupations liées aux difficultés financières et à la santé physique (la sienne et celle des proches), la pandémie a exacerbé les problématiques de santé mentale déjà existantes chez la population étudiante (Son, Hegde, Smith, Wang, Sasangohar, 2020; Grubic, Badovinac & Johri, 2020). Les établissements d’enseignement comptent également des étudiants étrangers qui étudient à distance dans leur pays d’origine, très loin du campus.

Le virage à l’enseignement à distance a entraîné des changements à la structure des services en santé mentale et à leurs modalités d’accès. Par exemple, la plupart des établissements d’enseignement postsecondaire sont passés à des services d’aide et de counselling en ligne (Conrad, Rayala, Menon, Vora K, 2020) et plusieurs universités nord-américaines encouragent les étudiants en situation de crise à utiliser les lignes d’écoute offertes par leurs services ou par d’autres organismes. Malgré les ressources offertes en ligne, une étude a démontré que la plupart des étudiants et des étudiantes avaient plutôt utilisé des stratégies d’autogestion de l’anxiété et du stress dans le contexte de la pandémie, 23 % d’entre eux utilisant des stratégies d’adaptation mésadaptées (Son, Hegde, Smith, Wang, Sasangohar, 2020). Une autre étude auprès d’étudiants et d’étudiantes de niveau collégial indique que 55 % des répondants ne savaient pas comment obtenir de l’aide en santé mentale en cas de crise (Active Minds, 2020). Plus encore, une autre étude démontre que la population étudiante avait en général de la difficulté à obtenir du soutien en santé mentale (Redden, 2020). Selon une recherche sur l’information liée à la santé mentale présentée sur les sites Web des centres de counselling, seulement 50 % d’entre eux donnaient des renseignements sur le counselling à distance et sur les ressources hors campus telles les lignes d’écoute offrant un service 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 (Siedel, Mohlman, Basch, Fera, Cosgrove & Ethan, 2020). Fait encore plus préoccupant, environ 30 % seulement des sites d’établissements d’enseignement donnaient des renseignements sur les services de crise en santé mentale (Siedel, Mohlman, Basch, Fera, Cosgrove & Ethan, 2020). Il est essentiel de donner à la population étudiante de l’information claire et facilement accessible pour diminuer les obstacles à surmonter pour obtenir des services.

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Trouver pourquoi les services de counselling sont sous-utilisés

D’autres études indiquent que la population étudiante n’utilise pas les services de counselling offerts par leur université. Parmi les raisons évoquées, on trouve : considérer que ses problèmes ne sont pas assez graves, un malaise à l’idée de recevoir de l’aide d’une personne inconnue et un manque de confiance envers les services de counselling (Son, Hegde, Smith, Wang, Sasangohar, 2020). Pour diminuer ces obstacles, on recommande d’offrir la possibilité de rendez-vous virtuels spontanés (Liu, Pinder-Amaker, Hahm & Chen, 2020) afin que les étudiants et les étudiantes en crise puissent avoir rapidement un premier contact avec une ressource de soutien. Pour réduire les risques de crise en santé mentale, on recommande également d’assurer un suivi proactif auprès des personnes vulnérables, notamment les étudiantes et les étudiants internationaux, de couleur, queer, autochtones ou qui ont déjà un historique de difficultés en santé mentale ou financières (Liu, Pinder-Amaker, Hahm & Chen, 2020).   Pour en savoir plus sur la communication avec ces divers groupes, nous vous invitons à consulter la trousse d’outils du CISMC sur les pratiques antioppression.