Intersectionnalité

Pour plus d’informations sur l’intersectionnalité, consultez la trousse d’outils Intersectionnalité invisible.

Le terme « intersectionnalité » a été inventé en 1989 par Kimberlé Crenshaw, une universitaire féministe noire, pour illustrer l’imbrication des systèmes de pouvoir et leur impact sur les personnes les plus marginalisées de la société. L’intersectionnalité est un cadre théorique qui reconnaît la dynamique structurelle du pouvoir et la manière dont l’identité et les expériences d’une personne peuvent être façonnées et informées par des facteurs tels que la race, la classe, le sexe et le handicap, entre autres relations sociales. L’intersectionnalité affirme que ces facteurs qui se chevauchent créent un réseau complexe de préjugés, y compris l’oppression et la discrimination à l’encontre des individus et des communautés. Elle comprend également que les caractéristiques de l’identité d’une personne, telles que la race ou le handicap, n’existent pas indépendamment les unes des autres, mais s’entrecroisent pour créer une expérience unique.

Exemple de cas

Fatima, une étudiante noire atteinte de schizophrénie[1] Dans cet exemple, Fatima préfère utiliser le langage centré sur l’identité (« étudiante atteinte de schizophrénie »), tandis que Jacques préfère le langage centré sur la personne (« étudiant qui se déplace en fauteuil roulant ») qui est également lesbienne et de confession musulmane, vivra son handicap différemment de James, un étudiant blanc hétérosexuel qui se déplace en fauteuil roulant. Fatima devra probablement aussi faire face à la misogynie, au racisme, à l’islamophobie, à l’homophobie et au capacitisme, autant d’éléments qui peuvent s’entrecroiser de diverses manières et conduire à sa discrimination. Fatima peut être confrontée au racisme dans ses relations avec les prestataires de soins de santé, ce qui pourrait avoir un impact sur ses soins et, par conséquent, sur son handicap. Fatima peut également constater qu’elle est victime de racisme au sein de sa communauté de personnes en situation de handicap et de capacitisme au sein de sa communauté noire, ce qui peut lui donner l’impression d’être une étrangère dans des espaces censés être des lieux d’appartenance. Imaginons par exemple que Fatima entende un commentaire sur le fait qu’elle soit « folle » lors d’un événement organisé sur le campus à l’intention des étudiants-es noirs-es de confession musulmane.

La vidéo suivante (en anglais seulement), réalisée par la militante Keri Gray, explique utilement l’importance de l’intersectionnalité dans le domaine du handicap.

Intersectionality & disability, ft Keri Gray, the Keri Gray Group #DisabilityDemandsJustice – YouTube

L’intersectionnalité du handicap peut également être observée dans des statistiques clés. Par exemple, alors que 22 % de la population canadienne vit avec un ou de plusieurs handicaps, les femmes sont toujours plus susceptibles que les hommes de vivre avec un handicap, selon Statistique Canada. Par ailleurs, une étude rétrospective de la National Health Interview Survey de 2012 aux États-Unis a révélé que les membres de la communauté afro-américaine non hispanique étaient plus susceptibles de vivre avec un handicap grave que les membres de la communauté blanche non hispanique. Ces statistiques illustrent le fait que le handicap a des répercussions différentes selon les communautés.

L’une des façons d’intégrer des considérations d’intersectionnalité dans les modèles de handicap est d’utiliser le cadre de la justice pour les personnes en situation de handicap. Ce cadre, développé par le projet de performance pour la justice du handicap Sins Invalid, comprend le capacitisme en le reliant à d’autres structures de pouvoir telles que le colonialisme et le capitalisme. La justice pour les personnes en situation de handicap reconnaît que ces structures de pouvoir ont un impact sur la manière dont le corps et l’esprit des personnes sont qualifiés de « déviants », « improductifs » ou « jetables ». Par exemple, dans un système capitaliste, chacun est censé produire une certaine quantité de travail pour être perçu comme précieux et « membre productif de la société », alors que de nombreuses personnes en situation de handicap n’ont pas la capacité d’atteindre le niveau de productivité que l’on attend d’elles. Ces personnes en situation de handicap sont donc souvent qualifiées de « paresseuses » ou d’« improductives ».

La justice pour les personnes en situation de handicap a également des conséquences sur l’idée d’indépendance des personnes en situation de handicap. Selon Mia Mingus, écrivaine et organisatrice communautaire de la justice pour les personnes en situation de handicap, « avec la justice pour les personnes en situation de handicap, nous voulons nous éloigner du « mythe de l’indépendance », selon lequel tout le monde peut et devrait être capable de tout faire par lui-même. Je ne me bats pas pour l’indépendance… Je me bats pour une interdépendance qui englobe les besoins et dit la vérité : personne n’y arrive tout seul et le mythe de l’indépendance n’est qu’un mythe. »

Il est essentiel que le personnel de l’enseignement postsecondaire comprenne l’intersectionnalité afin d’apporter un soutien culturellement pertinent et réfléchi aux étudiants-es en situation de handicap. La justice pour les personnes en situation de handicap nous fournit un cadre qui nous permet de mettre en œuvre ces considérations d’intersectionnalité et de modifier nos propres hypothèses sur le handicap.

Pour en savoir plus sur la justice pour les personnes en situation de handicap :

References

References
1 Dans cet exemple, Fatima préfère utiliser le langage centré sur l’identité (« étudiante atteinte de schizophrénie »), tandis que Jacques préfère le langage centré sur la personne (« étudiant qui se déplace en fauteuil roulant »)
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